* Je ne savais trop quoi en penser en en sortant, du Oliveira, je me demandais si on n'était pas dans un cas un peu similaire au dernier et catastrophique Raoul Ruiz, un film en roue libre, sauf que voilà, Oliveira ce n'est pas Ruiz, c'est quand même autre chose, c'est quand même au-delà, disons que Ruiz a une grosse décennie de pur génie, au milieu d'une filmographie très inégale, quand Oliveira me semble davantage constant...
* Puis plus j'y pense plus je l'aime. Pour le coup le cliché journalistique du "film vert" par un centenaire faisait sens, ce romanesque complet, romantisme absolu, presque naïf, la jambe levée en l'air lors du baiser hors champ, etc. Naïveté de jeune homme ; d'ailleurs le personnage féminin existe peu, ou disons n'existe qu'un peu, mais quand il existe on touche au sublime, la marionnette sans fil finale évidemment, mais aussi, et surtout, l'œil qui se faufile entre les plumes bleues, mutin, coquin, tricheur ("Ah c'est vous que j'aperçois depuis ma fenêtre?"), on dirait l'Angiolina de Matzneff.
* Mais surtout ce plan qui me revient, qui vaut à lui seul toutes les tentatives un peu ratées de télescopage des époques de son Christophe Colomb, que je n'aime pas trop, ce plan donc au port, ce plan large du numérique le plus métallique qui soit, les lumières de la ville dans leur scintillement numérique lointain, comme sorties du court métrage d'Akerman dans la baie de Shanghaï, en vérité j'ai surtout pensé à Othon, qui est pourtant le Straub que j'aime le moins, celui avec lequel on m'avait traumatisé à la fac et que je ne sais pas regarder, disons que je ne sais pas voir, comme on dit voir en peinture, seulement pour de mauvaises raisons, qu'on ne m'a pas laissé voir et que je suis toujours incapable de voir, du coup, à Othon donc, mais un Othon comique, cet homme qui passe pour son chapeau, puisqu'on parlait de Ruiz plus haut, ça a à voir avec les séquences sur les quais dans Les Trois Couronnes du Matelot, quelque chose de similaire, d'aussi cheveu sur la soupe, et pourtant de mille fois plus simple, ce que Ruiz met cinq ou six ou sept plans complexes à atteindre, avec lentille fendue et filtres et badigeonnage d'objectif, Oliveira sait le faire en un plan, drôle et touchant, d'une modernité incroyable. Je me disais donc ce soir, en me trompant sans doute, quitte à donner le bâton pour me faire battre, que ce que j'aimais chez Oliveira, c'était en quelque sorte la rencontre de Ruiz et de Straub (je l'avais déjà pensé devant le Miroir Magique, je le pense de plus en plus) ; sans pour autant que ce soit de la copie ou de l'hybridation, comprenez-moi bien, je parle de ma subjectivité propre, voilà tout.
* Belle idée, dans District 9, que les aliens et les humains se comprennent sans traduction. C'est ce qui m'a le plus marqué, je crois, ce que je trouve le plus beau, le plus émouvant.
mercredi 7 octobre 2009
Singularités.
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3 commentaires:
j'aime bien cette formule : "passer pour son chapeau". C'est une définition possible de l'aveuglement qui tend le film.
Mais Othon EST comique (c'est ce que j'ai toujours cru comprendre en écoutant ceux qui, contrairement à moi, aimaient les films des Straub) !
Ah tu parles à nouveau de cinéma, cool. (même si je n'ai vu aucun des films que tu évoques, à part District 9, qu'en penses-tu d'ailleurs ?)
District 9 a piqué l'idée de la non-traduction des langues à Far From Manhattan.
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