vendredi 10 juin 2011

À ma limite.

* En voyant Mafrouza, je me demande presque si j'ai le droit d'en penser du mal et c'est bien tout le problème du film : il a valeur de document. Je vois bien qu'on peut saluer la persévérance de Demoris à mener ses heures de film à leur terme, le parcours, quoi, réussir à faire sortir tous ces documents en salle, toutes ces heures de document filmé. Et ça documente, oui, ce quartier "informel" d'Alexandrie aujourd'hui disparu. Mais est-ce que j'ai le droit de penser qu'au-delà de cette valeur informative il n'y a pas beaucoup de cinéma? Que l'esthétique reste celle du reportage, ne va pas plus loin que ça et que c'est bien dommage, mais que moi, du coup, ça ne m'intéresse pas, je ne peux pas regarder ces cinq films, ça m'ennuie, ça ne me saisit pas esthétiquement. J'en ressors informé, mais ce n'est pas du cinéma documentaire comme je l'entends, ça ne me fait pas battre le cœur, ça ne m'emballe pas. Je trouve ça anonyme et c'est sans doute terrible qu'alors j'invalide le parcours et que le document ne m'imprime pas grand chose, puisqu'il ne m'imprime pas d'image de cinéma. C'est peut-être là ma limite spectatorielle.

* On peut m'opposer évidemment les formalismes, la suresthétisation qu'on rencontre par exemple chez Sylvain George, qui est une autre limite, réelle itou, gênante aussi, qui fait qu'on ne voit parfois plus le motif mais seulement le filmeur. Et on aurait largement raison de le faire.

* Mais je ne vois pas l'intérêt non plus d'opposer les extrêmes : mon idéal de spectateur et de praticien est dans l'entre-deux. J'ai peut-être tort, mais je n'ai pas le choix. Il n'y a que dans l'entre-deux que je vois tout ce qui importe à la fois, d'une seule et même fois. Et selon moi, c'est cette fois-là qui compte. Ni oublier la forme, ni la dissocier du fond : leur confluence seule est à mes yeux politiquement et esthétiquement (ou mieux : politiquement donc esthétiquement, esthétiquement donc politiquement) fertile.

4 commentaires:

monOmbre a dit…

Bien content. J'avais justement la flemme d'aller voir ce gros paquet de films étouffe-chrétien/comminatoires. Je n'ai pas été attiré par ce que j'en ai deviné. Déjà vu/politiquement correct et tutti fruti…
V. Ostria

Cédric a dit…

M. Ostria ne s'exprime que pour se faire valoir, c'est irritant à force. "J'ai deviné", "je connais", "je suis un marginal", "j'ai compris avant tout le monde" et tutti frutti...
Cédric

monOmbre a dit…

c'est amusant ces commentaires de commentaires. Je ne vois pas en quoi je me fais valoir par mon commentaire sur ce Mafrouza que je n'ai pas vu. Tout le monde se contrefout de ce que je pense. Je voulais simplement dire c'est que d'après les bandes annonces que j'en avais vu, ça sentait le politiquement correct et la commisération pour le tiers monde qui sont des formes d'exotisme contemporain. Ce M. Cédric est vraisemblablement un lecteur de mon blog, que j'aurai déçu pour une raison ou une autre. VO

Cédric a dit…

"Tout le monde se contrefout de ce que je pense." Non, mais à force de le croire, tu finis par te répandre un peu partout, et je le répète, c'est irritant. Sinon, oui, j'ai un peu lu ton blog, mais pas plus que d'autres blogs moins bouffés par l'égocentrisme.
Cédric