mardi 24 février 2009

Potentiels de la bande dessinée.

* C'est une lecture épuisante, dans le sens bonne fatigue du terme, dans le sens bonnes courbatures d'après un sport collectif, que l'Elektra de Frank Miller et Bill Sienkiewicz, il y a tellement, tellement à y prendre, à en dire, c'est d'une telle folie, d'une telle puissance, d'une telle cohérence dans l'excès... J'avoue que je me suis régulièrement demandé comment le travail de scénarisation s'était fait, comment le relais écrit/dessin avait pu être mené sur un tel livre, sans doute qu'il fallait bien un dessinateur au scénario pour que le livre ressemble à ça, il fallait quelqu'un qui savait parler du dessin, qui savait parler au dessin, qui savait parler en dessin, c'est en tout cas extraordinaire, à chaque relecture je me dis que c'est le Miller que je préfère, que c'est le personnage le plus puissant qu'il ait jamais eu à traiter, un personnage malade d'être de bande dessinée, plus précisément d'être un personnage de comic-book, un personnage malade de sa condition fantasmatique, un personnage malade d'être un monstre surpuissant, d'être beau dans sa violence, d'être gracieux suspendu tête à l'envers à un hélicoptère un lance-roquettes en main, drame magnifique (ce qui a à voir avec le Hulk de Leterrier, si on réfléchit bien), il faut relire le passage à l'hôtel, les douches d'Elektra et la frustration de l'alcoolo bionique, "j'ai déjà vu mieux", etc, il y a de ça dans son Sin City aussi, mais ça n'a jamais été aussi palpable qu'ici, aussi concret, aussi physique, alors même que le dessin de Sienkiewicz est très certainement moins charnel que le trait généreux et plein de Miller.

* Vous vous rendez compte que c'est sans doute le seul bouquin au monde où on peut lire "Là ! Un nain qui vole!" sans pouffer de rire?

* Ceci pour dire qu'avec tout ça, j'ai presque envie de voir son The Spirit, à Miller ("presque" envie, hein).

* Parlant BD, pendant cette semaine de désoeuvrement, pour m'occuper, j'ai acheté les deux derniers numéros de Fluide et le Hors-Série hivernal, ainsi que la dernière livraison du Psykopat (ah je m'emmerdais, je vous ai dit), ça faisait longtemps que je n'avais tâté ni de l'un ni de l'autre (sont chers, ces magazines...). Et ce qui se pressentait depuis un bail, à savoir que Fluide n'était plus que l'ombre de lui-même, s'est hélas confirmé. Larcenet il n'y a pas si longtemps prédisait que Fouloude Gloziol ressemblerait bientôt au Journal de Spirou avec des bites. Il était loin du compte : en vérité FG aujourd'hui, c'est la résurrection de BoDoï, des blagues navrantes façon Nicolas Poupon ou Claire de Nuit, ou ces bandes dessinées anonymes sur les blondes, les bébés ou les informaticiens... Le fond du fond étant bien entendu Sex Crimes de Thiriet (pourtant pas toujours manchot, Thiriet, qu'est-ce qu'il fout là?) et Thierry Robin (ouh que c'est laid), en fait toute la nouvelle collection Fluide Glamour, un truc de fond de chiottes, qui tient évidemment la tête des ventes grâce aux espèces de merdasses sous-Dany (c'est-à-dire vraiment pas bien haut) d'Arthur de Pins... T'as qu'à voir, BoDoï adore.

* La surprise c'est le plutôt bon niveau du Psyko, qui s'en fout, qui tient sa route, qui flanche pas, qui n'essaie pas la drague éhontée de Fouloude façon Bienvenue à BoboLand (je vomis pas tout FG, hein, y'a encore du Sattouf par moment, du Gaudelette, du Lindingre, etc., pis quelques trus de patrimoine pour se souvenir de ce que valait fut un temps la maison Audie, le génialissime Paracuellos est un bon exemple), qui se bariole pas de couleurs bonux, qui donne pas dans le clonage de trait assisté par ordinateur façon De Pins, mais n'hésite pas à donner dans le cracra, le jeté là, le dégueu, l'impulsif. Alors on y trouve aussi de la daube avariée, notamment l'autre espèce de Jacques Faizant centriste qu'est Schvartz (ils le virent quand, bordel?), mais aussi de petits miracles, comme l'increvable Phil (lui, là, je trouve pas ses dessins en ligne), cette anomalie géniale de la bande dessinée actuelle, sorte de chaînon manquant entre Reiser, Lelong (oui, feu Jean-Marc Lelong, qu'on oublie toujours, et plus encore depuis qu'il s'est fait sauter la gueule au fusil y'a cinq ans jour pour jour, R.I.P) et Machin-qui-griffone-au-bistrot-avec-un-stylo-pourri-sur-du-papier-sale, son "Histoire horrible de mon enfance" dans le dernier numéro, deux pages sans chute, sans histoire, juste deux pages bizarres comme tombées là, valent bien d'acheter la revue (4,50€, j'avoue c'est l'abus).

* Drôle de hasard, tiens, je déniche cet hommage improbable de Miller à Carmen Cru, dans un autre de ses Elektra, avec Lynn Varley cette fois, Elektra lives again :


* Malausa (qui fait son fanboy de Nispel alors même qu'il n'a apparemment jamais entendu parler de Pathfinder) devrait revoir Eden Lake : le Vendredi 13 de Marcus Nispel est un nanar en scope, un vrai. D'ailleurs, Vincent, les Jason, c'est des slashers, hein, pas des survivals. Mais oui, mais oui, on va dire que c'est quand même toi qui fais les films de genre à Chronic'Art, t'inquiètes.

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